La nuit de Skyros by Cauvin Patrick

Auteur:Cauvin, Patrick [CAUVIN, Patrick]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Éditeur: EDI8 - PLON
Publié: 2011-04-06T22:00:00+00:00

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8 La fin de l’histoire

La fin de l’histoire

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Et maintenant, la théâtrothérapie !

Lundi de clinique. Simone Prétard prend du corsage de semaine en semaine. Elle a mijoté son coup pendant un trimestre, et ce matin, réunion générale du personnel soignant, les intervenants comme les permanents.

Elle a foncé direct et il était difficile de ne pas succomber à son enthousiasme. Donc, avec l’aide d’une compagnie théâtrale locale, décision de monter un spectacle pour le 18 mai 2010 très exactement, jour où la maison fêterait ses cent ans. Madame Prétard a le sens des commémorations.

Le responsable de la troupe théâtrale était là. Il nous a fourni un épais dossier sur ses expériences en milieu psychiatrique. Extrêmement sûr de lui. Il paraît évident à l’entendre que plus il y a de théâtre, moins il y a d’asile. Je suis resté fasciné par la complication de son rasage. Les lignes dessinées par barbe et moustaches cernent au cordeau une bouche molle et un menton proéminent : à vue de nez, il doit passer vingt bonnes minutes tous les matins à réaliser ces ajustements géométriques...

Invité à intervenir dans le débat, je me demande si la bonne question à poser n’est pas de demander s’il est prudent de confier nos malades à un individu capable de passer autant de temps devant sa glace, rasoir en main, pour un résultat au final assez médiocre. Je me suis lâchement réfugié derrière les habituelles banalités concernant l’expression. J’ai même cité Roger Caillois, dont je ne pensais pas me souvenir aussi bien, et comment il délimitait le domaine du jeu et celui du sérieux. Ce qui sépare, c’est que dans un cas on peut dire « pouce » et s’arrêter, et pas dans l’autre. La difficulté pour certains malades est qu’ils ne savent pas dire « pouce », et une incursion dans ce qui est pour nous un univers théâtral sera perçue par eux comme une incursion dans le réel, avec tous les dangers que cela peut impliquer.

J’ai réservé mon avis sur le projet, mais ce serait stupide d’être contre... J’ai toujours trouvé qu’en psychiatrie, tout ce qui était de la thérapie de groupe était suspect, étant entendu que certains y trouvent leur compte. La conclusion à tirer de tout cela est que ma préférence va vers les solitaires, ceux que l’autre dérange, voire affole.

Invité au déjeuner, le théâtreux nous a bassinés avec ses diverses expériences. Avant de se lancer dans le monde théâtral, il était lecteur à Sainte-Anne. Il entrait dans la chambre des malades et lisait des textes. Il en avait tiré, disait-il, beaucoup de satisfaction, et une fracture du crâne. Il était tombé sur un maniaco-dépressif qui n’aimait pas Proust, ce que l’on peut comprendre, et qui lui avait explosé le crâne avec son tabouret.

Moins de temps donc pour m’occuper de mes patients. J’ai recommandé le port du casque en permanence, durant toute la semaine, à l’un d’entre eux. Je sais qu’il le supporte assez facilement.

Tous les autres n’ont pas bougé. Aucune évolution. A se demander si le

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